Dans un autre chapitre, nous avons pu étudier brièvement les deux principaux radar utilisés dans l’aéronautique civile. D’autres systèmes existent et mériteront quelques explications dans des développements futurs. Nous allons nous intéresser à un point essentiel : la visualisation. Cet aspect des choses appartient à la fois au passé, au présent et au futur.
Visualisation, le passé
Nous citions le film « la Bataille d’Angleterre » dans le chapitre sur le radar primaire… Si vous avez vu ce film, vous vous rappellerez surement de salles où des opératrices déplacent des maquettes sur une table immense représentant une carte de l’Angleterre. Il s’agit de la première forme visualisation du trafic aérien: le plotting.
Cette forme de visualisation est certes rudimentaire mais elle permet de compiler des sources d’informations:
– rapports de position d’appareils identifiés
– plots d’appareils inconnus
– rapports externes comme des guetteurs, etc.
Dans l’immédiat après guerre, le trafic aérien civil sera géré de cette manière. Avec les tubes cathodiques, apparaît le possibilité de renvoyer directement une image sur un écran. Cette nouvelle opportunité ouvre une voie qui est toujours la notre… Si les premières « visu » (visualisations dans notre jargon) sont monochromes et utilisent comme source un radar primaire, les suivantes, aidées par des calculateurs toujours plus puissants, affichent des données issues de plusieurs sources (radar primaires et/ou secondaires) qui sont, en plus filtrés (élimination des phénomènes indésirables, échos fixes, etc.).
Visualisation, le présent
Le présent varie d’un pays à l’autre… Dans nos pays occidentaux, la tendance est à la visualisation sur écran couleur avec un traitement informatique toujours plus poussé. Ainsi de nombreuses aides se sont progressivement rajoutées:
– Filet de sauvegarde (STCA – Short Term Conflict Alert) qui permet d’avertir le contrôleur d’un rapprochement potentiellement anormal de deux avions,
– Alerte de proximité du sol (MSAW – Minimum Safe Altitude Warning) qui permet de notifier au contrôleur qu’un avion descend en dessous d’une altitude jugée dangereuse (Système qui aurait pu, a priori, éviter une catastrophe comme celle du mont Ste Odile).
D’un point de vue plus général, le contrôle en route français ne travaille plus qu’au radar secondaire. Les centres de contrôle d’approche les plus gros conservent un radar primaire pour détecter les éventuels avions intrus dans leurs espaces.
En outre, de nouvelles applications émergent comme le radar dit « sol » spécialement conçu pour suivre les évolutions au sol des avions (roulages, traversées de piste, etc.) et qui se révèle très utile dans les cas de mauvaise météo.
Visualisation, le futur
Le futur… Les enjeux sont économiques avant tout. Le transport aérien est en pleine expansion malgré les freins conjoncturels qui peuvent apparaître: guerres, attentats, hausse du pétrole… Chaque acteur de l’aérien recherche quelque chose dans l’amélioration des services du contrôle: sécurité, capacité, rapidité, flexibilité…
La sécurité
Elle apparaît sous des formes diverses… Pour le contrôleur, il s’agît de la principale préoccupation. Les solutions que proposent les ingénieurs: des algorithmes toujours plus puissants pour détecter les conflits, faciliter les communications mais aussi une fiabilisation des liaisons air-sol grâce à des échanges de données [1].
Les enjeux économiques
Les compagnies aériennes recherchent des coûts toujours plus réduits et l’apparition des compagnies « low costs » renforce encore ce mouvement. La baisse des coûts implique un service toujours plus performant et toujours moins cher. Le paroxysme de cette politique se trouve dans notre passé, dans les années 80 plus exactement, période où l’administration Reagan, faisant face à une grève, licencie 11 000 contrôleurs aériens Ils s’engagent dans un programme d’automatisation du contrôle aérien qui engloutira des milliards sans déboucher. L’automatisation n’est plus vraiment à l’ordre du jour avec cet échec. Mais l’assistance du contrôleur est toujours plus importante dans le but d’écouler toujours plus trafic.
Le facteur limitant est de plus en plus les capacités aéroportuaires sur des plates formes qui doivent de plus en plus intégrer la donnée environnementale dans leurs calculs (nuisances sonores avec l’opposition des riverains) [2][3].
En images
Quelques images du futur : le projet ERATO [4]
Vous voyez ici une image issue du projet ERATO censée montrer l’évolution future des visualisations. Il s’agit d’un futur proche (5 à 10 ans). Mais, en réalité, le projet ERATO existe depuis des années et évolue régulièrement. Juste à titre d’information, vous trouverez sur le site du CENA (Centre d’Etudes de la Navigation Aérienne) les projets, les prototypes témoignant des champs de recherche pour les systèmes du futur.
- [1]De nombreuses techniques utilisant des échanges de données numériques sont à l’étude voire déjà en service : Datalink, Mode S, ADS-B, ACARS, etc…↩
- [2]Les nuisances sonores sont aujourd’hui l’une des préoccupations majeures malgré le ressenti que peuvent en avoir les riverains. Un certain nombre de mesures font l’objet d’études et d’expérimentations.↩
- [3]Actuellement, la limite de capacité est effectivement atteinte le plus souvent par les aéroports alors qu’il y a dix ans, cette capacité limite découlait plus des services « en route ».↩
- [4]J’ai volontairement laissé cette partie dans l’état dans lequel je l’avais créé il y a déjà quelques temps. Le projet ERATO ne verra pas le jour en l’état mais dans le cadre d’un autre projet appelé E.E.E. que je vous invite à découvrir au fur et à mesure de son développement dans la rubrique Développement d’une IHM↩